Un PLU peut-il imposer l’utilisation de certains matériaux ?
Un hiatus entre la position de la l’administration et celle de la juridiction administrative est caractérisée à la suite d’un arrêt rendu récemment par la Cour administrative de Lyon (CAA Lyon, 11 juill. 2019, n° 18LY00937).
Dans cette affaire, l’article UC 11.3 du POS de la commune litigieux prévoyait que « Les façades seront réalisées à partir de l’usage d’un ou deux matériaux en plus du bois traité non peint qui devra recouvrir au moins 25% de la surface de la façade. Les revêtements de façade en briques de parements, en placage de pierre si les lits ne sont pas horizontaux, ainsi que les peintures de couleurs vives, y compris blanc pur, sont interdits ».
Le maire, pour s’opposer aux travaux envisagés, s’était fondé sur la circonstance que le projet, se traduisant par la pose en façade de panneaux de polyuréthane, ne satisfaisait pas aux exigences du paragraphe 3 de l’article UC 11 du POS imposant, dans la mesure de 25% de la surface de la façade, le recours au bois traité non peint.
Les premiers juges avaient annulé la décision du maire et estimé que ces dispositions devaient être lues comme n’imposant que le recours à un matériau ayant l’apparence du bois traité non peint, et non spécifiquement l’emploi du bois.
La Cour, saisie en appel, casse cependant le jugement. Elle considère que « les documents locaux d’urbanisme peuvent, s’agissant de déterminer les règles concernant l’aspect extérieur des constructions en application des dispositions de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme alors en vigueur dont la teneur est désormais reprise à l’article L. 151-18 de ce code, imposer l’utilisation de certains matériaux pour les constructions, y compris quand ces dernières ne sont pas incluses dans un périmètre protégé. » Selon elle, le POS pouvait légalement imposer, en des termes excluant toute interprétation et pour des considérations esthétiques ayant trait au respect de l’architecture traditionnelle savoyarde, le recours partiel au bois traité non peint.
Cette analyse s’inscrit cependant en opposition avec la doctrine de l’administration, selon laquelle un POS/PLU ne peut pas prescrire ou interdire l’emploi de matériaux particuliers. Il ressort en effet d’une réponse ministérielle récente :
« L’article L. 151-18 du code de l’urbanisme prévoit que : « Le règlement [du plan local d’urbanisme] peut déterminer des règles concernant l’aspect extérieur des constructions neuves, rénovées ou réhabilitées, leurs dimensions, leurs conditions d’alignement sur la voirie et de distance minimale par rapport à la limite séparative et l’aménagement de leurs abords, afin de contribuer à la qualité architecturale, urbaine et paysagère, à la mise en valeur du patrimoine et à l’insertion des constructions dans le milieu environnant. » Les règles auxquelles les constructions et les clôtures peuvent être soumises dans le plan local d’urbanisme (PLU) concernent donc les caractéristiques formelles de chaque élément architectural, tel que les toitures, les ouvertures, ou les ouvrages en saillie, ainsi que les règles d’aspect extérieur contribuant à la qualité de leur insertion dans le milieu environnant, telles que les couleurs de ces éléments architecturaux. Cependant la loi n’autorise pas les PLU à prescrire ou interdire l’emploi de certains matériaux, de telles exigences se justifiant et étant autorisées uniquement dans les secteurs faisant l’objet d’une protection particulière, tels que les sites patrimoniaux remarquables. En dehors de ces secteurs, seul l’aspect du revêtement de la construction pourra être réglementé sans pouvoir strictement interdire un matériau ou son imitation » (Rép. min. n° 01509 : JO Sénat Q., 11 oct. 2018, p.5163).
Il convient donc d’attendre que le Conseil d’Etat ait la possibilité de se prononcer sur ce sujet.