Mise en conformité d’une construction et présomption d’urgence en référé
Une mise en demeure prescrivant une mise en conformité qui implique nécessairement la démolition de constructions, permet de considérer que la condition d’urgence est en principe satisfaite en cas de demande de suspension de son exécution présentée par le propriétaire de l’immeuble qui en est l’objet (CE, 11 déc. 2023, n° 470207, Sté Brunetière).
Le contexte
Une SCI a saisi le juge des référés du tribunal administratif, statuant sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, aux fins d’obtenir la suspension de l’exécution de décisions par lesquelles le maire l’a mise en demeure de remettre dans son état originel la parcelle dont elle est propriétaire, en application de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme (en vertu de ce texte, l’autorité administrative compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme peut prescrire, par mise en demeure, la mise en conformité ou la régularisation d’une construction).
Le juge des référés ayant rejeté sa demande, la SCI a formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.
L’apport de la décision du Conseil d’Etat
Selon la Haute juridiction, eu égard à la gravité des conséquences qu’emporte une mise en demeure prononcée en application de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme, lorsqu’elle prescrit une mise en conformité qui implique nécessairement la démolition de constructions, la condition d’urgence est en principe satisfaite en cas de demande de suspension de son exécution présentée, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, par le propriétaire de l’immeuble qui en est l’objet.
Il ne peut en aller autrement que dans le cas où l’autorité administrative justifie de circonstances particulières faisant apparaître, soit que l’exécution de la mesure de démolition n’affecterait pas gravement la situation du propriétaire, soit qu’un intérêt public s’attache à l’exécution rapide de cette mesure.
Faisant application de cette analyse au litige qui lui était soumis, le Conseil d’Etat observe que le maire a mis en demeure la SCI, en application de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme, de remettre dans son état originel une parcelle lui appartenant, notamment en démolissant deux dépendances, et que, par un autre arrêté, ce maire a renouvelé cette mise en demeure, l’assortissant d’une astreinte. La SCI a demandé au juge des référés du tribunal administratif, statuant sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution de ces deux décisions.
Pour rejeter sa demande, dirigée contre des décisions de mise en demeure prescrivant notamment la démolition de deux bâtiments, le juge des référés du tribunal administratif a recherché si la décision contestée préjudiciait de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre, en se fondant notamment sur l’absence de diligence de la SCI.
En statuant ainsi, alors que la condition d’urgence doit, en principe être regardée comme satisfaite sauf circonstances particulières opposées par l’autorité administrative, le juge des référés a commis une erreur de droit.
Par suite, la société requérante est fondée à demander l’annulation de l’ordonnance qu’elle attaque.