Action en démolition de la commune : absence de nécessité de démontrer l’existence d’un préjudice personnel et direct causé par les constructions irrégulières
Une commune peut saisir le tribunal de grande instance en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d’un ouvrage édifié ou installé sans autorisation d’urbanisme ou en méconnaissance de cette autorisation. L’action civile se prescrit par dix ans à compter de l’achèvement des travaux (article L. 480-14 du code de l’urbanisme).
Reprochant au propriétaire d’une parcelle située en zone NC du plan d’occupation des sols, réservée aux activités agricoles, d’avoir implanté sans autorisation sur cette parcelle une maison d’habitation, une piscine, des boxes pour chevaux, un « mobil home » et un cabanon, la commune l’avait assigné en démolition sur le fondement de ces dispositions.
La Cour d’appel ayant fait droit à cette demande, le propriétaire s’est pourvu en cassation.
Le propriétaire faisait grief à l’arrêt d’avoir accueilli la demande en démolition, alors, selon lui, que la commune n’aurait intérêt à la démolition d’un ouvrage construit sans permis de construire que si elle subit un préjudice personnel directement causé par ladite construction. Toujours selon le propriétaire, en retenant qu’en l’absence de toute précision par le législateur, la commune dispose d’une action autonome en démolition ne nécessitant pas la démonstration d’un préjudice causé par les constructions édifiées sans permis de construire, la cour d’appel aurait violé l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme.
Ce raisonnement n’a pas été retenu par la Cour de cassation (arrêt n°402 du 16 mai 2019 (17-31.757) – Cour de cassation – Troisième chambre civile), qui estime que l’action attribuée à la commune par l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme, qui a pour objet la démolition ou la mise en conformité, est destinée à faire cesser une situation illicite.
Selon elle, la volonté du législateur d’attribuer une action spécifique au profit de la commune serait compromise si cette action obéissait à la même condition de preuve d’un préjudice que l’action de droit commun ouverte à tout tiers victime de la violation de règles d’urbanisme.
Dès lors, elle en conclut que, ayant retenu à bon droit que la commune disposait d’une action autonome ne nécessitant pas la démonstration d’un préjudice personnel et direct causé par les constructions irrégulières, la cour d’appel, qui a constaté l’irrégularité des ouvrages construits par le propriétaire sans avoir obtenu, ni même sollicité, un permis de construire ou une autorisation préalable, dans une zone qui faisait l’objet d’une protection particulière pour le maintien d’une activité agricole, en a exactement déduit que la demande en démolition devait être accueillie.