Appréciation élargie du dol en matière de cession de site pollué

Appréciation élargie du dol en matière de cession de site pollué

Deux sociétés ont signé un protocole portant sur la cession d’actions.

Elles ont parallèlement conclu un contrat de garantie d’actif et de passif comportant une clause limitative d’indemnisation.

Après qu’une partie des actions de la société cédante a fait l’objet d’un transfert de propriété avec paiement, le cessionnaire a informé le vendeur qu’il mettait en oeuvre la garantie et qu’il refusait de payer le solde du prix de cession, en raison de la dissimulation, par le cédant, de la pollution d’un site.

La société qui s’était substituée au cessionnaire a assigné le cédant, à titre principal, en annulation de la clause de la convention de garantie de passif limitant l’obligation d’indemnisation et en indemnisation de l’ensemble des préjudices afférents à la pollution au fur et à mesure qu’ils se révéleraient, et, à titre subsidiaire, en constatation de l’acquisition de la garantie de passif prévue au contrat, et en indemnisation des divers préjudices afférents à la pollution du site.

La Cour d’appel a rejeté sa demande mais l’arrêt a été censuré par la Cour de cassation pour les motifs suivants (Cass. com., 27 janv. 2021, n° 18-16.418, 89 F-D).

La Haute juridiction rappelle que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.

Pour rejeter la demande formée par la société cessionnaire au titre du dol, l’arrêt de la Cour d’appel avait relevé que s’il était constant que si le vendeur s’était abstenu de remettre à l’acquéreur un rapport faisant état d’une pollution importante du site, dont il avait connaissance depuis 2008, le contrat de garantie ne contenait aucune déclaration mensongère.

La Cour d’appel avait également retenu que, que quand bien même le cessionnaire n’aurait pas disposé de ce rapport, il ne pouvait ignorer le caractère classé de l’installation dont il faisait l’acquisition ni, par voie de conséquence, l’existence d’une possible pollution des sols, ce d’autant que des prescriptions complémentaires avaient été imposées par l’autorité préfectorale dans un arrêté relatif à l’ouverture de cette installation, ce qui aurait dû l’amener à procéder à l’audit environnemental prévu dans le protocole de cession.

La Cour d’appel ajoutait que les éléments contenus dans cet arrêté auraient dû, à tout le moins, conduire le cessionnaire, compte tenu de la nature de l’activité exploitée, à faire un point précis avec le cédant portant spécifiquement sur la pollution du site, sans qu’il soit pour autant nécessaire de se livrer à une étude de la pollution des sols.

L’arrêt d’appel en déduit qu’il ne peut être reproché au cédant d’avoir sciemment caché les pollutions afin de ne pas faire échouer la vente.

Toutefois, selon la Cour de cassation, se déterminant ainsi, sans rechercher si le cédant ne s’était pas abstenu de communiquer le rapport précité au cessionnaire afin de lui cacher des informations dont il savait le caractère déterminant pour celui-ci, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.

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